Laisser faire la nouvelle orthographe |
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« Moi je l'ai entendue déclarer lors de l'émission C dans l'air que faire des fautes d'orthographe n'était pas grave... » est un des nombreux exemples qui auraient pu entamer notre discussion. Aucune erreur si c'est une femme qui a fait cette déclaration, si c'est elle qui l'a faite...
Eh oui ! Notre grammaire de la langue française est ainsi faite. Elle a inventé une règle qui n'a rien de logique : un participe passé employé avec l'auxiliaire avoir ne s'accorde pas avec le sujet, mais avec le COD du verbe si ce COD le précède...
Je mets ma culotte ou je mets mon pyjama... aucune raison de penser que je dois faire attention à l'objet que je mets pour orthographier le verbe mettre.
Je mettrai ma culotte ou je mettrai mon pyjama... toujours aucune raison de penser que je dois faire attention à l'objet que je mets pour orthographier le verbe mettre.
J'ai mis ma culotte ou j'ai mis mon pyjama... attention, au passé simple, aucune raison de penser que je dois faire attention à l'objet que je mets pour orthographier le verbe mettre... mais au passé composé, il y a de quoi commencer à se poser des questions... pas de panique, ici le COD suit, donc aucun accord à faire.
Ma culotte, je l'ai mise ou mon pyjama, je l'ai mis... grosse panique : sans changement de temps, sans changement de l'objet que je mets, l'ordre des mots seul va justifier que l'objet que je mets va fondamentalement influencer la façon d'orthographier le verbe mettre.
Quoi de plus illogique... l'esprit scientifique de notre équipe a voulu en savoir plus.
Une seule réponse nous a pu être retenue, sans pouvoir nous convaincre pour autant. Que d'arguments avancés pour la justification d'une règle qu'il serait plus facile et plus logique de supprimer !
– un verbe à la voix active peut se mettre à la voix passive ;
– pour mettre un verbe à la voix passive, on emploie le verbe être au même temps que le verbe de la voix active que l'on fait suivre du participe passé du verbe de la voix active ;
– le COD du verbe à la voix active devient le sujet du verbe de la voix passive.
Lourde argumentation pour justifier l'accord du participe passé employé avec l'auxiliaire avoir avec le COD qui le précède : J'ai mis ma culotte, transposé à la voix passive, deviendrait Ma culotte a été mise par moi, ce qui justifierait la mise au féminin du participe passé mise uniquement au cas où le COD précède ce participe passé, mais pas dans le cas où J'ai mis ma culotte...
Nous espérons que cette explication, qui rend logique le français, vous aura convaincu du bien-fondé de cette règle !
Dura lex, sed lex ! Nos spécialistes de la langue française en ont décidé ainsi et il n'y a pas lieu de discuter... sauf que cette règle souffre d'une multitude d'exceptions ou de cas particuliers :
– si le COD ou pseudo-COD est “en” ;
voir notre page spéciale :
« Ce voyage, voilà les deux impressions qu'on m'en a apporté(es). Il retournait contre sa femme les arguments qu'il en avait reçu(s). De ce compte rendu du voyage, il a supprimé plus de lignes qu'il n'en a gardé(es). Des fautes, je ne sais combien j'en ai corrigé(es). » |
« La quinzaine d'euros que j'ai reçu(e)/(s). Cette nuée d'oiseaux que j'ai vu(e)/(s). Le groupe de musiciens que j'ai entendu(s). » |
« Combien de bouteilles a-t-il bu(es) ? Que de patience tu as montré(e) ! Combien de fautes avez-vous fait(es) ? Des livres, combien en avez-vous lu(s) ? » |
* le participe passé suivi d'un infinitif
* quelques étapes historiques de cette règle
* le participe passé “fait” suivi d'un infinitif
* le participe passé “laissé” suivi d'un infinitif
* les difficultés relatives à l'ancienne orthographe
Inutile de rappeler ici la règle du participe passé employé avec l'auxiliaire avoir qui ne s'accorde pas avec le sujet, mais avec le COD du verbe si ce COD le précède...
La règle dite habituelle de l'accord d'un participe passé suivi d'un infinitif est :
« Lorsqu'un complément d'objet direct précède un participe passé employé avec l'auxiliaire avoir et suivi d'un infinitif, ce participe passé reste invariable s'il subit l'action exprimée par l'infinitif.
Ex. : Antoinette fut remplie de joie en voyant ce magnifique arbre sorti d'une graine qu'elle avait vu planter par son papa. »
À l'inverse, on pourra aussi lire :
« Lorsqu'un complément d'objet direct précède un participe passé employé avec l'auxiliaire avoir et suivi d'un infinitif, ce participe passé s'accorde en genre et en nombre avec le C.O.D., s'il fait l'action exprimée par l'infinitif.
Ex. : Ton enseignante ? Je l'ai entendue annoncer de nouvelles mesures pour lutter contre les fautes d'orthographe. »
Dans le premier cas, ce n'est pas la graine qui plante, mais le père ;
dans le second cas, c'est l'institutrice qui annonce les nouvelles dispositions.
Pas de doute, la règle est claire : le COD du verbe noté au participe passé doit faire l'action du verbe utilisé à l'infinitif et doit précéder ce participe.
En dehors de cette règle unique et claire, certains grammairiens rajoutent des cas :
– si l'infinitif est sous-entendu, le participe passé reste invariabe (avec l'illustration par certains exemples) :
J’ai fait tous les efforts que j’ai pu. (sous-entendu → que j'ai pu faire)
Tu as donné les garanties que tu as dû. (sous-entendu → que tu as dû donner)
Règle ou cas en apparence inutile car le COD est chaque fois une proposition infinitive,
QU'ai-je pu ? faire que, c-à-d des efforts. QU'as-tu dû ? donner des garanties.
– si le participe passé est suivi d'un infinitif suivi de la préposition “par” :
Ce cas nous parait inutile, car il sous-entend que le COD du participe ne fait pas l'action notée par l'infinitif,
puisqu'un complément d'agent indique une voix passive.
– si le participe passé est suivi d'un verbe à l'infinitif ayant le pronom “en” comme COD
« Des années, j’en ai vu passer tant ! »
Nous avons déjà vu que cette règle n'était pas très fiable. (cf. page spéciale : accord si en est COD).
Ici, la présence de l'adverbe de quantité pourrait transformer l'apparent COD en un complément de quantité
(combien d'années ai-je vu passer ?)
Attention cependant, on trouve des grammaires (de bonne réputation, parfois) mais dont la formulation est incorrecte voire peu claire.
ActivitésFLE : « le participe passé "fait" du verbe "se faire" suivi d'un infinitif est invariable. Exemple : La souris s'est fait manger.» Ce qui laisse penser que cette règle n'est applicable qu'en cas de voix passive du verbe “faire”...
Cordial : « Le participe passé conjugué avec "avoir" et suivi d'un infinitif,
s'accorde si l'objet direct qui précède se rapporte au participe. »
La graine est l'objet du participe et elle se rapporte aussi bien au participe voir qu'à l'infinitif planter. Cordial parle-t-il du COD du verbe au participe ou à l'infinitif ?
Grammaire Reverso : « Lorsqu'un participe passé est suivi d'un infinitif (j'aurais aimé partir), il faut se demander si le complément qui précède le participe passé est complément d'objet direct (COD) de l'infinitif ou non. » La vraie règle dit qu'il faut regarder si le COD du participe est sujet actif de l'action de l'infinitif... Grammaire Reverso prend une aide peu fiable décrite ci-dessous.
Lecturel : énonce correctement la règle mais l'illustre d'un exemple incorrect puisqu'une préposition s'intercale entre le participe et l'infinitif : Le participe passé suivi d'un infinitif s'accorde si le complément d'objet direct le précède et qu'il fait l'action exprimée par l'infinitif. Emma ! Cette exaltation vous a empêchée de comprendre. Cette exaltation a empêché « Emma » de comprendre (accord avec p.p.)
Maxicours : voit des COD où il n'y en a pas : « Les fraises, qu’elles ont voulu acheter, n’étaient pas mûres. Le COD « les fraises » est placé avant le participe passé : 1e condition remplie. [NDLR : Elles ont voulu QUOI ? acheter des fraises... donc le COD de voulu est une proposition infinitive acheter.] Le COD ne fait pas l’action du verbe à l’infinitif : ce ne sont pas les fraises qui « s’achètent » elles-mêmes. [NDLR : comparer acheter à s'acheter est grammaticalement incorrect.]
Heureusement, certaines grammaires nous donnent des aides à l'application de cette règle :
– Peut-on faire suivre l'infinitif d'un complément introduit par “par” ?
Si oui, le participe est invariable.
Antoinette fut remplie de joie en voyant ce magnifique arbre sorti d'une graine qu'elle avait vu planter par son papa.
=> évidemment, le “par” y est, donc invariable.
Ton enseignante ? Je l'ai entendue annoncer par quelqu'un de nouvelles mesures pour lutter contre les fautes d'orthographe.
=> curieuse construction, donc accord possible.
– L'infinitif a-t-il lui-même un COD ?
Si oui, on accorde le participe qui précède. (fiable?)
Antoinette fut remplie de joie en voyant ce magnifique arbre sorti d'une graine qu'elle avait vu planter par son papa. => planter a-t-il un COD ? Oui, que mis pour graine => il faudrait accorder le participe... (peu fiable).
Ton enseignante ? Je l'ai entendue annoncer par quelqu'un de nouvelles mesures pour lutter contre les fautes d'orthographe. => annoncer a-t-il un COD ? Oui, de nouvelles mesures, donc accord (fiable ici).
– Peut-on placer le COD du participe passé après le COD et remplacer l'infinitif par “en train de” suivi de cet infinitif ?
Si oui, on accorde le pp qui précède
Antoinette fut remplie de joie en voyant ce magnifique arbre sorti d'une graine qu'elle avait vu planter par son papa. => en voyant cet arbre sorti d'une graine vue en train de planter : Non, ce n'est pas la graine qui est en train de planter => il faudrait ne pas accorder le participe... (fiable).
Ton enseignante ? Je l'ai entendue en train d'annoncer de nouvelles mesures pour lutter contre les fautes d'orthographe. => Oui, c'est elle qui annonce. Oui, donc accord (fiable ici).
– Si une préposition, à ou de, est intercalée entre le participe passé et l’infinitif, le participe passé s’accorde en genre et en nombre avec le complément d’objet direct si ce dernier le précède et s’il se rapporte au participe passé et non à l’infinitif.
Une grammaire[1] nous laisse penser que la meilleure façon d'appliquer cette règle de base est de se poser deux questions consécutives :
Q1 – Sujet de l'auxiliaire + auxiliaire avoir + PP + qui ?/quoi ? ==> COD placé devant ?
Q2 – Est-ce que + COD complément objet direct + fait l'action de + verbe à l'infinitif ?
Ex1 : Antoinette fut remplie de joie en voyant ce magnifique arbre sorti d'une graine qu'elle avait vu planter par son papa.
Q1 – elle avait vu quoi ? ==> qu' = une graine, placé devant le pp
Q2 – Est-ce que une graine fait l'action de planter ?
NON... donc PAS d'accord
Ex2 : Ton enseignante ? Je l'ai entendue annoncer de nouvelles mesures pour lutter contre les fautes d'orthographe.
Q1 – J'ai entendu qui ? ==> l' = ton enseignante, placé devant le pp
Q2 – Est-ce que ton enseignante fait l'action de annoncer ?
OUI... donc ACCORD
Mais la situation n'est pas toujours aussi claire... surtout quand le participe passé à analyser fait partie d'un verbe pronominal...
Elle s'est vu(e) demander de retirer sa coloration...
– lui a-t-on demandé de retirer sa coloration ? si oui, elle s'est vu demander de... (ce n'est pas elle qui a demandé...)
– a-t-elle demandé elle-même de retirer sa coloration ? si oui, elle s'est vue demander de... (c'est elle qui a demandé...)
De même : Elle s'est vu(e) répondre fermement...
– lui a-t-on répondu fermement ? si oui, elle s'est vu répondre... (ce n'est pas elle qui a répondu...)
– a-t-elle répondu fermement ? si oui, elle s'est vue répondre... (c'est elle qui a répondu...)
Claude FAVRE de VAUGELAS, né en 1585, et grand grammairien de l'époque, fut élu en 1634 à l'Académie française. Selon lui, « quand le participe passé précède le nom qu'il régit, comme dans l'exemple : j'ai receu vos lettres, ce participe reste invariable ». Ouf ! s'exclameront certains.
Toujours selon lui, « quand le nom va devant le “prétérit”, comme dans cette proposition : les lettres que j'ai receuës..., il faut dire que j'ai receuës... et non pas que j'ai receu..., à peine de solécisme ». Ouf encore ! notre traduction de l'accord du participe passé employé avec l'auxiliaire avoir qui ne s'accorde pas avec le sujet, mais avec le COD du verbe si ce COD le précède... est conforme à ce que disait Vaugelas. François de Malherbe (1555 - 1628) avait déjà énoncé ces deux règles.
Le lecteur aura sans doute compris qu'il fallait utiliser le sens grammatical du mot “régir”. On dit qu'un mot est régi, lorsque ce mot a une fonction ou une forme régie, dépendante ou déterminée par un autre mot, appelé régissant.
Étonnant cependant, Vaugelas continue en précisant que le participe passé accompagné de l'auxiliaire avoir, ne doit pas s'accorder avec le régime qui le précède, quand « le nominatif qui régit le verbe, se trouve après le verbe, au lieu d'être avant ; il faut dire : la peine que m'a donné cette affaire..., et non : la peine que m'a donnée cette affaire... » Le nominatif signifiant ici le sujet du verbe.
L'Académie française et Bossuet ont suivi ces règles, dont la dernière nuance a été oubliée de nos jours... certains regretteront cette évolution de la langue qui ne serait qu'un abaissement du niveau de maitrise de la langue.
Plus étonnant encore, Vaugelas ajoute que, « en parlant d'une femme, il faut dire je l'ai vu venir et non pas je l'ai vue venir », ce qui met à mal l'origine de la règle actuellement appliquée.
Déjà au début du XVIIe siècle, les résistants à l'évolution de la langue existaient. Corneille, invoquant cette théorie des participes, reconnait qu'elle est suivie de la plupart des habiles écrivains, mais il ajoute cependant qu'elle est contestée de quelques-uns et qu'il ne condamne pas ceux qui font difficulté de la suivre. Depuis, à chaque modification d'orthographe de la langue française, on a vu quelques opposants... mais l'opposition dure rarement plus d'un siècle.
Depuis longtemps il est admis que le paticipe passé “fait” suivi d'un infinitif reste invariable.
Sans doute parce qu'il n'était pas toujours évident de déterminer si le COD de “fait” pouvait être l'acteur du verbe mentionné à l'infinitif, voire même si le participe passé “fait” pouvait avoir un COD, s'il est suivi d'un infinitif.
N'oublions pas non plus qu'une proposition infinitive peut être COD d'un verbe conjugué, mais pour être une proposition, l'infinitif doit avoir un sujet (exprimé ou sous-entendu) et le mot sujet de l'infinitive doit être différent du sujet de la proposition principale.
– J'espère gagner.
Gagner est un infinitif, sans sujet exprimé mais sous-entendu.
Gagner est COD du verbe espérer, mais n'est pas une proposition infinitive (j'espère que je gagnerais).
– J'ai entendu courir.
Courir est un infinitif, sans sujet exprimé mais sous-entendu et omis.
(j'ai entendu, quelqu'un courait), deux sujets différents, donc proposition infinitive.
La proposition infinitive est COD du verbe entendre.
– Tu écoutes les avions voler. OU Tu écoutes voler les avions.
(sujet de l'infinitive inversé dans le 2e cas)
Voler est un infinitif d'une proposition infinitive (tu écoutes, les avions volent).
Le COD du verbe écouter est-il « les avions » ?
– Nous regardons danser sur ces airs de musique.
Danser est un infinitif d'une proposition infinitive (nous regardons, quelqu'un danse).
Le sujet de l'infinitive est omis mais sous-entendu.
« Elles se sont fait embaucher » :
elles ont fait quoi ? pas “se”, ce qui ne veut rien dire,
mais “se faire embaucher”.
Facile : même règle qu'avec le participe passé “fait” : invariable !
Dès 1901, Georges LEYGUES, ministre de l'Instruction publique en France, fait publier au Journal officiel de la république française, un texte officiel (qui n'est pas une tolérance) et qui stipule que « pour le participe passé construit avec l'auxiliaire avoir, lorsque le participe passé est suivi soit d'un infinitif, soit d'un participe présent ou passé, on tolérera qu'il reste invariable, quels que soient le genre et le nombre des compléments qui précèdent.
les fruits que je me suis laissé ou laissés prendre; – les sauvages que l'on a trouvé ou trouvés errant dans les bois. Dans le cas où le participe passé est précédé d'une expression collective, on pourra à volonté le faire accorder avec le collectif ou avec son complément.
la foule d'hommes que j'ai vue ou vus. »
1976, cette règle apparait encore dans l’arrêté Haby du 28 décembre 1976, publié au Journal Officiel en 1977, qui fixe les tolérances grammaticales ou orthographiques lors des examens ou concours (brochure CNDP). Toutefois, cet arrêté est bien antérieur à la loi Rocard de 1991 qui réglemente en France l’application des réformes orthographiques, et n’a jamais eu force de loi (il fut d’ailleurs ignoré).
Le texte de 1976 est bien un texte réglementaire, dont l’application s’impose à tous... Il ne semble pas que ce soit le cas. Celui de 1990 n'est qu'une série de recommandations pour unifier des graphies différentes, mais pour lesquelles aucune graphie n'est fautive... c'est bien la faiblesse de ce texte.
En 1990, l'Académie recommande :
« 6. Participe passé : le participe passé de laisser suivi d’un infinitif est rendu invariable : il joue en effet devant l’infinitif un rôle d’auxiliaire analogue à celui de faire, qui est toujours invariable dans ce cas (avec l’auxiliaire avoir comme en emploi pronominal).
Le participe passé de laisser suivi d’un infinitif est donc invariable dans tous les cas, même quand il est employé avec l’auxiliaire avoir et même quand l’objet est placé avant le verbe. (Voir Analyse 5.)
Exemples :
Elle s’est laissé mourir (comme déjà elle s’est fait maigrir) ;
Elle s’est laissé séduire (comme déjà elle s’est fait féliciter) ;
Je les ai laissé partir (comme déjà je les ai fait partir) ;
La maison qu’elle a laissé saccager (comme déjà la maison qu’elle a fait repeindre). »
En 2008, en France, depuis la parution du Bulletin officiel de l'Éducation nationale hors série no 3 du 19 juin 2008, « l’orthographe révisée est la référence » et est désormais incluse dans les programmes scolaires.
Le dictionnaire de l'Académie (dernière édition en cours d'élaboration) explique ce choix et confirme la similitude entre “laissé” et “fait” suivis d'un infinitif. On y lit, noté en gras, en fin de définition du verbe “laisser” : |
Cette modification est déjà présente dans les grammaires, comme le Bon Usage (15e éd., § 951, b, 1° et 2°). avec tonalité et commentaire positifs : « Cette proposition avait déjà été faite par certains grammairiens, et Littré (cf. laisser) ne leur donnait pas tort, tout en constatant que l’usage n’était pas déclaré. En fait, des auteurs assez nombreux pratiquent l’invariabilité de laissé, avec plus ou moins de constance. »
Bruno Dewaele, professeur agrégé de lettres modernes et champion du monde d'orthographe, signale sans approuver l'attitude de certains réticents à ces dispositions orthographiques. Il dit : « Les réformateurs de 1990 ont souhaité aligner le verbe « laisser » sur « faire », en décidant que son participe passé serait toujours invariable devant un infinitif. Beaucoup n’en continuent pas moins à appliquer la règle ci-dessus et à distinguer entre « elle s’est laissée mourir » (c’est bien elle qui meurt, d’où l’accord) et « elle s’est laissé critiquer sans réagir » (ce n’est plus elle qui critique, on la critique, d’où l’invariabilité). »
On trouve certes encore quelques capillotétratomistes qui refusent cet élargissement de la règle du participe fait au participe laissé. Des éternels réticents à l'évolution de la langue qui s'obstinent à démontrer que toutes les rectifications orthographiques de 1990 sont illogiques et ne visent qu'à abaisser le niveau de maitrise de la langue française. Les recommandations de 1990 précisent que si vous écrivez fait et laissé invariables lorsqu'ils sont suivis d'un infinitif, vous ne faites pas de fautes.
Dans les autres cas, ils suivent la règle générale des participes passés, et vous risquez de faire des fautes.
Quand nous leur demandons sur quelle logique ils se basent pour nous expliquer la différence entre les cas de “laissé” et “fait” suivis d'un infinitif, ils nous rétorquent que les cas sont diamétralement différents :
argument envoyé de façon picturale qui ne fait que rappeler l'ancienne règle et qui n'explique en rien la différence entre les participes “laissé” et “fait”. Non convaincus, nous poursuivons notre questionnement : « Vos enfants, je les ai fait(s) parler autant qu'ils l'ont voulu. Quelle logique veut que l'on écrive Je les ai fait marcher, mais Je les ai laissé(s) marcher ? » qui reçoit comme réponse « celle qui est expliquée dans tout bon ouvrage de grammaire : la distinction entre l'action subie et l'action faite ». Dans les deux cas, il nous semblait que c'était eux qui marchaient ou qui parlaient, qui faisaient donc l'action décrite par l'infinitif.
L'argumentation, généralement acceptée, peut ne pas l'être chez certains qui continueront à prétendre que « Je les ai fait marcher : ils subissent une action ; je les ai laissés marcher : ils sont acteurs dans l'action », même si dans les deux cas ils marchent... Pas encore convaincu ? Les capillotétratomistes pourraient même aller jusqu'à changer l'acteur de l'infinitif et illustrer leur propos d'un « “les pantins, je les ai fait marcher” : ils subissent l'action d'un tiers pour pouvoir marcher »... évidemment, on connait peu de pantins capables de s'articuler par eux-mêmes ;-).
Courageux ceux qui défendent les anciennes règles ! Conscients que leur plaidoirie n'a pas influencé le jury, ils pourraient revenir à la charge et prétendre que lorsque l'on fait marcher ou que l'on fait chanter des enfants, ils ne marchent ni ne chantent pas... ils pourraient même soutenir qu'avec « “fait”, impossible de mettre le S à fait car “les” n'est pas le COD de “fait” ». Et pourquoi le serait-il moins dans l'expression Je les ai fait chanter que dans Je les ai laissé(s) chanter? quoique... c'est peut-être le seul argument qui aurait pu engendrer le fait que “fait” a été considéré comme invariable avant “laissé”. Différence peu apparente, puisque dans les deux cas, le vrai COD est une proposition infinitive : J'ai fait QUOI ? marcher les enfants. J'ai laissé QUOI ? chanter les enfants...
Pas persuadés d'avoir persuadé... ils pourraient aussi justifier que “faire faire” est indissociable, alors que “laisser faire” l'est... en appuyant leur justification d'un commentaire : « Je les ai laissés partir... là, je les ai laissés... faire une action... celle de partir. Là on peut totalement dissocier le verbe laisser de celle de l'action réalisée par ceux qui partent. Alors que “je les ai fait partir”, fait est indissociable de partir. » Curieux, comme si ce n'était pas le cas pour “faire”, pour preuve : « Je les ai fait chanter ou marcher, car je les ai fait... faire une action... celle de marcher ou chanter. Ici aussi, on peut totalement dissocier le verbe faire de l'action réalisée par ceux qui marchent ou chantent.
Ces tartes je les ai faites... ou je les ai fait cuire.
Ces enfants je les ai laissés... ou je les ai laissé chanter.
Où est l'indissociabilité ? »
Un nouvel assaut en argumentant de l'initiateur de l'action : « Quand tu fais marcher les enfants, c'est toi qui es l'initiateur de l'action, c'est TOI qui les as fait marcher. On peut considérer que c'est toi qui les laisses tomber : tu les as laissé tomber. [...] Tout est question de sens, mais on ne perçoit pas tous de la même façon le sens des mots. » Réaction tellement peu convaincante que notre partie défenderesse s'est laissé piéger en n'accordant plus son “tu les as laissé tomber” et qui, dans les deux cas, montre que l'initiateur de l'action est le même.
Quelle grammaire parle de l'initiateur de l'action indiquée par l'infinitif ?
« “La sécurité ne les a pas laissés entrer”, c'est logique, puisque ceux qui rentrent sont les auteurs de l'action de l'infinitif (rentrer) » pourrait être un nouveau soubresaut, peu crédible et peu convaincant... La Palice en aurait dit autant !
Et pourquoi pas une tentative de responsabilité de l'action de l'infinitif ? « A laisse agir B, B est le responsable principal de l'action ; A fait agir B, A est le responsable principal de l'action. » Cela nous laisse perplexes : faut-il savoir qui est l'acteur du verbe à l'infinitif ou faut-il regarder la responsabilité de celui qui suggère cet acte ?
Quand nos amis viennent, nous les laissons entrer, peu importe que nous les fassions entrer par la porte frontale ou latérale... ils gardent la pleine liberté et la pleine responsabilité de leur entrée. On n'est plus au temps de l'esclavage quand on fait faire quelque chose, plus de soumission... Quand les amis sont là, nous les faisons chanter et les laissons chanter jusqu'au petit matin, s'ils s'amusent.
Pas d'autres réponses que des exemples de grammairiens qui ont suivi l'ancienne règle... trop facile pour ceux qui ont fait leurs études primaires avant 1990...
En 1990, l'Académie annonce que les participes “laissé” et “fait” suivis d'un infinitif restent invariables pour des raisons communes et en cette fin 2017, nous nous heurtons encore à des individus qui viennent de tenter de nous expliquer que les deux cas sont fondamentalement différents, sans pouvoir nous montrer la différence de façon sure.
Autant faire simple et choisir l'invariabilité de laissé suivi d'un infinitif,
comme on le fait avec fait suivi d'un infinitif.
C'est faciliter l'apprentissage de notre langue déjà si compliquée,
c'est choisir de ne jamais faire de fautes, alors que mal accorder serait une faute,
c'est rendre plus accessible l'orthographe à ceux qui feraient des fautes en appliquant mal l'ancienne règle,
c'est admettre que l'ancienne règle n'était pas des plus précise,
c'est encourager notre Académie française dans sa volonté de simplifier la langue,
c'est éviter les accords fautifs selon la règle traditionnelle de l'accord du participe passé devant un infinitif,
c'est accepter que notre langue française évolue,
c'est reconnaitre qu'une langue qui évolue ne signifie pas que ses utilisateurs régressent...
8 8 8 8 8 8 8 8 8 8 8 8 8 8 8 8 8 8 8 8
[1] cf. https://www.alloprof.qc.ca/BV/pages/f1286.aspx
[2] cf. ... la part qu'a eu la divine vierge à ce merveilleux ouvrage..., Bossuet, Conception, 1668, éd. Leb.
[1] cf. https://www.alloprof.qc.ca/BV/pages/f1286.aspx
= + = + = + = + = + = + = + = + = + = + = + = + = + = + = + = + =
Voir aussi :
et les caractères spéciaux avec "alt"... toujours utile...
caractère capitale |
À | Â | Ç | È | É | Ê | Ë | Î | Ï | Ô | Ù | Û | Ü |
alt + 4 chiffr. | 0192 | 0194 | 0199 | 0200 | 0201 | 0202 | 0203 | 0206 | 0207 | 0212 | 0217 | 0219 | 0220 |
alt + 3 chiffr. | 183 | 182 | 128 | 212 | 144 | 210 | 211 | 215 | 216 | 226 | 235 | 234 | 154 |
caractère bas d casse |
à | â | ç | è | é | ê | ë | î | ï | ô | ù | û | ü |
alt + 4 chiffr. | 0224 | 0226 | 0231 | 0232 | 0233 | 0234 | 0235 | 0238 | 0239 | 0244 | 0249 | 0251 | 0252 |
alt + 3 chiffr. | 133 | 131 | 135 | 138 | 130 | 136 | 137 | 140 | 139 | 147 | 151 | 150 | 129 |
caract§re autre |
« | » | œ | æ | Œ | Æ | … | esp. inséc. |
“ | ” | " | ‘ | ’ |
alt + 4 chiffr. | 0171 | 0187 | 0156 | 0230 | 0140 | 0198 | 0133 | 0160 | 0147 | 0148 | 0034 | 0145 | 0146 |
alt + 2 ou 3 chiffr. | 174 | 175 | 339 | 145 | 338 | 146 | / | 255 | / | / | 34 | / | / |
caractère autre |
– | — | ¡ | ¿ | ¼ | ½ | ¾ | ± | ñ | Ñ | € | . | . |
alt + 4 chiffr. | 0150 | 0151 | 0161 | 0191 | 0188 | 0189 | 0190 | 0177 | 0241 | 0209 | 0128 | 0 | 0 |
alt + 2 ou 3 chiffr. | 173 | 168 | 172 | 171 | 243 | 241 | 164 | 165 | / | / | / |
Si vous n'avez pas de pavé numérique sur un ordi portable,
il suffit d'appuyer sur les touches Fn et NumLock (Inser) en même temps,
et le pavé numérique sur les touches
7(7) 8(8) 9(9) 0(/)
U(4) I(5) O(6) P(*)
J(1) K(2) L(3) M(-)
?(0) /(.) §+(+)
(la dernière ligne/colonne est/sont différente(s) selon les claviers belges, français...)
sera activé
et les raccourcis Alt + code chiffré fonctionneront.