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Accord si emploi d'un collectif suivi d'un complément au pluriel
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Nom collectif suivi d'un complément au pluriel


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Suite à la lecture d'un article du Monde, relatif à l'élection présidentielle de 2017, une longue discussion a suivi... non pas concernant nos différences de points de vue politiques, mais concernant l'accord d'un verbe qui suit un nom collectif suivi d'un complément au pluriel : « Un groupe de députés devraient s'adresser au candidat mardi en fin de matinée, lors de la réunion hebdomadaire du groupe LR de l'Assemblée. » Devraient, singulier ou pluriel ?
Notre première impression fut que l'on pouvait avoir le choix entre le singulier, pour accord avec le nom collectif, ou le pluriel, pour accord avec le complément.
Une majorité de nos lecteurs admettront que le cas n'est pas comparable à un autre nom suivi d'un complément. Plus d'un aura compris qu'écrire « les poubelles de ma maman qui pue ont été déchirées » est une grossière erreur, l'accord ne peut en effet pas se faire avec le complément du nom (pauvre maman), mais avec le nom poubelles.

La situation devient totalement différente si le nom suivi du complément est un collectif... Faut-il écrire « 

Les collectifs sont nombreux ; en voici quelques-uns :  affluence, afflux, amas, assemblée, attroupement, bande, beaucoup, brassée, cartel, centaine, cinquantaine, clientèle, cohue, collection, colonie, comité, compagnie, convoi, cortège, dizaine, douzaine, ensemble, équipe, infinité, file, flopée, foule, foultitude, grouillement, groupe, haras, horde, infinité, légion, liste, lot, masse, moitié, multitude, nuée, paire, paquet, partie, peuple, phalange, pléiade, poignée, quantité, quart, ramassis, ribambelle, série, suite, tapée, tas, (team), tiers, tinée, tribu, total, trop, troupe, troupeau, volée et j'en passe.

Nous nous sentons donc dans l'obligation de préciser le choix que l'on a, avec ce complément d'information « Dans le cas présent d'un collectif suivi d'un complément et non accompagné d'un article défini ou d'un adjectif épithète qualificatif, ne peut-on pas accorder indifféremment avec le collectif ou son complément selon la vision globale ou détaillée que l'on veut exprimer ?
Au singulier, on insiste que ce ne doit être qu'un groupe et non tous,
au pluriel, on insiste que ce doit être des députés.
Votre éclairage SVP ? »
 

• Les arguments de la discussion
• Les arguments grammaticaux

  

Les arguments de la discussion

présidentielle 2017 Lemonde1/ Un premier argument « on n'a jamais entendu “un groupe de personnes SONT venues” », sans autres commentaires, a rapidement été contrebalancé par la réplique « mais j'ai entendu “un groupe de gens attendent devant...” » appuyée d'une argumentation supplémentaire, extraite de languefrancaise.net qui affirme que « Le mot groupe est un nom collectif. Au même titre que : amas, assemblée, bande, [...] L'accord peut se faire avec le nom collectif OU le complément de ce nom collectif.
Un lien intéressant ici : http://www.aidenet.eu/grammaire04c.htm
Selon celui-ci, l'accord se ferait plus volontiers avec SOLDATS (complément du nom collectif, lui-même précédé par un article indéfini). »... voilà qui confirme la nuance concernant le déterminant qui accompagne le collectif...

2/ Sans même réagir à cet élément de la discussion, un autre argument siffle en notre défaveur « Larousse correcteur d'accord avec moi : http://www.larousse.fr/correcteur ». Curieux argument, puisqu'à notre sens, dès l'instant où l'on accepte l'un ou l'autre (avec un 'ou' non exclusif), il me semble qu'accepter l'un ne signifie pas rejeter l'autre...

3/ Un troisième argument surgit, suite aux éléments avancés par aidenet.eu « Ils écrivent “un groupe de coureurs sont passés” : désolé, c'est horrible, c'est une faute.
Alors que le groupe de danseuses que j'ai vues, là, c'est acceptable. »
Pas convaincu par cette argumentation sans autres justifications, je me demande si c'est la tenue des coureurs ou des danseuses qui influence le choix de mon interlocuteur. J'ose à peine ajouter « Le groupe de danseuses que j'ai vues (les danseuses) a traversé la rue (article défini, donc singulier... j'ai vu des danseuses, mais LE groupe a traversé). »
Une réponse cependant à cet argument : « le verbe reste au singulier, l'idée d'accorder le participe passé "vues" avec le complément du nom n'est pas choquante ».

4/ Retour de l'argument du correcteur orthographique : nos âmes de didacticiens nous demandent d'y répondre autrement. Nous nous risquons donc : « Cela me parait normal, “la poubelle de mes parents”, le correcteur refuse l'accord avec un complément... mais je ne suis pas certain qu'il connaisse la règle des collectifs...
Et un correcteur n'est pas diplômé grammairien ;-) »

5/ Soucieux d'avoir d'autres avis, nous cherchons et trouvons une discussion à propos de l'accord du verbe avec un collectif suivi d'un complément au pluriel :
« Si je lis un groupe de soldats achèvent un cheval,
   je vois pratiquement chacun des soldats affairé à achever le cheval,
alors que si je lis un groupe de soldats achève un cheval,
   je me dis qu'un groupe s'est chargé d'organiser l'achèvement du cheval, mais que tous ne sont pas forcément affairés sur la pauvre bête. »
Pas suffisamment convaincant, puisque l'un de nos interlocuteurs nous répond immédiatement « Un groupe, pour moi, est le terme prédominant, le vrai sujet, le complément du nom ne peut prendre la priorité pour accorder le verbe. Si tu remplaces le verbe achever par un verbe d'un autre groupe, on entend la différence : un groupe de soldats accomplissent une mission > pour moi, seul "accomplit" est correct.
Idem pour le correcteur Cordial/Larousse. »
Toujours non convaincu, nous lui répondons « Un groupe de soldats seront exécutés
ne gêne pas plus mon oreille que
quelques soldats seront exécutés.
Mais j'ouïs/j'ois avec des oreilles différentes des tiennes »

6/ D'autres intervenants prennent position : « C'est le groupe qui sera exécuté, sinon on aurait mis des soldats seront exécutés, mais on n'aurait pas su lesquels, or ce sont ceux du groupe... ! » Je ne relève même pas que l'article de “un groupe” n'est pas l'article de “le groupe”.
La discussion continue avec un argument qui revient souvent « Essaie le correcteur orthographique Cordial ! »
Nous nous décidons donc d'aller voir ce que dit le site dudit correcteur et nous y lisons « Un nom collectif est un nom constituant une collection (un groupe, une foule, une multitude, etc.). Lorsqu'il est suivi du nom qui représente les éléments de cette collection (un groupe de soldats, une foule de manifestants, une multitude d'oiseaux, etc.), le verbe s'accorde, selon le sens, tantôt avec le nom collectif (singulier), tantôt avec son complément (pluriel).

La multitude de soldats avançait sur un seul front. 
C'est la multitude qui avance. 
Le groupe de soldats avançaient. 
Ce sont les soldats qui avancent.
L'usage est très variable et dépend en priorité de l'attention portée par le scripteur à un terme ou à l'autre, mais quelques règles, à peu près observées, peuvent aider à l'accord. »

7/ Un nouvel argument : on me parle maintenant de « Entité, collectif avec prééminence de ce sens collectif d'un nom au singulier. Prééminence du singulier. » Curieux, nous nous inquiètons de savoir quels sont les collectifs qui ont une prééminence de sens collective et non singulière... quelles sont les grammaires qui en parlent... le silence nous répondit.

8/ Quelques échanges encore : d'un côté pour s'apitoyer que « bcp de sites sont allés à la solution de facilité : accord selon la pensée de l'auteur... », de l'autre pour rappeler que : « Une nuance : j'accepte les deux, selon le sentiment de l'auteur, tu refuses le pluriel... »
Nous nous plions finalement à tester ce correcteur orthographique qui contredit notre façon de voir les choses : un des exemples extrait de http://www.aidenet.eu/grammaire04c.htm, et surprise :
 
larousse cordial groupe

Bien obligés de conclure que l'échange se termina, fautes d'échangistes... la grammaire accepte les deux, mais nous n'avons pas accepté la faute décriée, là où il n'y en avait pas... puisque (quasi) tous s'accordent à dire qu'on peut employer les deux, même s'il existe des nuances dans leurs justifications, quand justifications il y a... et mes échangistes n'avaient donc pas tort en apportant la preuve suivante :
cordial groupe singulier

Notre calme et notre certitude nous a permis de rester aussi en bons termes avec le dictionnaire du CNRTL qui écrit : « Une colonie de petites hirondelles grises avaient, à l'intérieur, tapissé de leurs nids les parois du rocher; elles voltigeaient par centaines, un peu surprises de notre visite, et s'excitant les unes les autres à crier et à chanter. »

 

Les arguments grammaticaux

Tous semblent s'accorder sur un point : on a le choix.
Tous semblent acquiescer que l'accord se fait selon le sens que l'auteur veut y mettre :
* au singulier, on insiste sur l'aspect collectif, sur les éléments formant un ensemble ;
* au pluriel, on insiste sur la nature des individus qui font partie du groupe, sur les éléments dans leur pluralité... accord au pluriel avec le verbe si chacun d'eux fait l'action du verbe.

Mais certains grammairiens poussent l'analyse plus loin.
 

• généralement admis
• deux précisions de l'Académie française
• quelques précisions du correcteur orthographique Cordial de Larousse
• quelques précisions apportées par Grammaire de Aidenet.eu
• le point de vue du Bescherelle
• les nuances de Grevisse 422d et du site ÉtudesLittéraires.fr

 

généralement admis

L'Académie française partage l'avis de Maurisse Grevisse et précise que dans le cas où un collectif singulier suivi d'un complément au pluriel implique un accord au pluriel, la  subordination logique l’emportant sur la subordination grammaticale, on parlera d’accord par syllepse.

L'Académie fournit de nombreux exemples :

 

deux précisions de l'Académie

Si le nom collectif est la plupart ou un nombre ou une quantité non accompagné(e) d'un déterminant, l'accord doit se faire avec le complément. Sans exemple pour ce propos.

Si le nom collectif est un nom numéral au singulier suivi d’un complément au pluriel, l’accord peut se faire avec ce complément ou avec le terme quantitatif quand la personne qui écrit arrête son attention sur celui-ci plutôt que sur son complément. Exemple :

 

quelques précisions du correcteur orthographique Cordial de Larousse

Même acceptation de la règle générale, selon le sens que veut donner le scripteur :
La multitude de soldats avançait sur un seul front. 
   C'est la multitude qui avance. 
Le groupe de soldats avançaient. 
   Ce sont les soldats qui avancent.

1. L'accord se fait avec le complément, donc au pluriel, avec :

Avec les exemples :

2. L'accord se fait au choix avec les noms de fraction ("la moitié, le tiers, le quart, une partie de, une fraction de"), ce dont nous avions déjà discuté dans notre page spéciale "pour cent", en y apportant des nuances.

3. Et une troisième précision qui nous parait lourde et peu claire, concernant l'usage avec des adverbes de quantité :

      1. Si un adverbe de quantité accompagné de son complément (Combien de difficultés. Trop de marins. Que de patience, etc.) est sujet de la proposition, le verbe s'accorde avec le complément. Si celui-ci est absent, il est censé être au pluriel. En fait, l'adverbe se comporte comme un déterminant et le nom est le noyau du groupe, c'est avec lui que se fait l'accord.
      2. Si c'est l'adverbe de quantité qui exprime, en fait, l'idée dominante, il arrive que l'accord se fasse avec celui-ci, au singulier.
      3. Cet accord est habituel lorsque l'adverbe est nominalisé par la présence d'un déterminant. Cette nominalisation est fréquente avec "le peu, ce peu, le trop". Mais même dans ce cas, selon l'attention portée par le scripteur, on trouve l'accord avec le nom ou l'adverbe.

Avec des exemples pour chaque cas :

      1. Combien de difficultés. Trop de marins. Que de patience, etc.
        Trop de marins sont partis. 
        Combien de lettres sont écrites 
        Combien sont...
      2. Trop de complaisance serait blâmé.
        Le trop de coups a usé son cerveau.
      3. Le peu de choses qu'il avait retenues.

Enfin, Cordial rappelle cette règle particulière de la langue française :
Après "plus d'un" le verbe se met, habituellement au singulier.
Après "moins de deux" le verbe se met au pluriel.

 

 

quelques précisions apportées par Grammaire de Aidenet.eu

L'idée générale du choix selon le sens ou selon la nuance apportée par le scripteur est défendue ici aussi :

Aidenet distingue essentiellement deux cas : la nature du déterminant qui accompagne le collectif...

1. précédé d'un l’article défini ou d’un déterminant démonstratif ou possessif, c'est souvent ce déterminant qui règle l’accord et le verbe prend la marque du singulier

2. précédé d'un article indéfini "un" ou "une", c’est souvent le complément du nom collectif qui règle l’accord et le verbe prend la marque du pluriel

3. Aidenet rappelle aussi d'autres détails qui ne changent pas fondamentalement ce qui est dit par ailleurs :

      1. Avec les noms "dizaine, douzaine, centaine, cinquantaine..." l'accord se fait en règle générale avec le complément
      2. Avec "une infinité", l'accord se réalise très souvent avec le complément qui exprime une idée de très grand nombre > verbe au pluriel 
      3. Avec "la majorité de, la totalité de" le verbe se met généralement au singulier. (Précédés de "la")
      4. Avec "une majorité de, une quantité de, quantité de" l’accord se fait au pluriel, avec le complément. (Précédés de "un, une")
      5. Avec "la plupart, beaucoup de, bien des, trop de, combien de, tant de, nombre de" l'accord se fait avec le complément et le verbe se met en général au pluriel
      6. Avec "une foule, une multitude, un tas", l'accord du verbe se réalise le plus souvent avec le complément

avec les exemples qui accompagnent :

Et avant de clôturer, Aidenet rappelle ce qu'est une syllepse : C'est une construction syntaxique désignant un accord se faisant selon le sens et non les règles grammaticales habituelles. 
- Une foule de malades accourait
   > On choisit le nom collectif > la foule > pour représenter l'idée de la foule qui accourt
   > règle grammaticale usuelle.
- Une foule de gens accouraient. 
   > On a choisi dans cet exemple de privilégier le fait que ce sont des gens qui accouraient
   > c'est-à-dire d'après le sens > et on a accordé le verbe au pluriel, contrairement à l'exemple précédent.

[NDLR : avec des règles qui se nuancent tellement par des adverbes tels que généralement ou en règle générale, souvent, très souvent ou le plus souvent, toute la liberté reste de choisir l'accord avec le collectif ou son complément.]

 

 

le point de vue du Bescherelle

Ne nuance pas l'idée généralement admise :

« Lorsque le groupe nominal sujet représente un ensemble de personnes ou d'objets, le verbe se met
soit au singulier (si l'on veut souligner qu'il s'agit d'un seul et même ensemble),
soit au pluriel (si l'on insiste sur tous les éléments qui constituent cet ensemble). 
Un groupe d'enfants se mit (se mirent) à hurler.
Une foule de visiteurs se précipitèrent (se précipita) dès l'ouverture des portes.
 »

 

 

Les nuances de Grevisse 422d et du site ÉtudesLittéraires.fr

Le Bon Usage de Maurice Grevisse se base aussi sur le déterminant qui accompagne le nom collectif. On lira :
« lorsque le nom collectif (autre qu'une indication de quantité) est précédé d'un article défini (le), d'un déterminant possessif (mon) ou d'un déterminant démonstratif (ce), l'usage ORDINAIRE est de faire l'accord avec le collectif (nom complété) :
* LA foule des ignorants est grande.
* MA troupe de comédiens vous amusera.
* CETTE bande de moineaux s'envolera.

À l'inverse :
* UNE compagnie d'oiseaux tourbillonnaient dans le ciel bleu. (Flaubert)
Le complément est senti comme étant le véritable noyau du groupe / syntagme.
→ Il fait partie de [CETTE bande de jeunes] qui cherche la vie dans la ville.
→ Il fait partie d'UNE bande de jeunes qui cherche / cherchent la vie dans la ville.
Avec l'article indéfini (un), l'usage est d'accorder avec le collectif, mais l'accord avec le complément est tout aussi grammatical.
Le pluriel est normal ici :
→ Il fait partie de CETTE bande de jeunes qui se SONT DISPUTÉS.
Le sens de réciprocité amène tout naturellement le pluriel.
 

 

les nuances du portail linguistique du Canada

Encore un site de confiance qui se base sur le déterminant qui accompagne le nom du collectif :

En règle générale, lorsque le collectif accompagné d'un complément pluriel est précédé d'un article indéfini (un, une, des), on a le choix :

Si le collectif est précédé d'un article défini (le, la), d'un adjectif possessif (ma, ton, ses) ou d'un démonstratif (ce, cet), on accorde généralement le verbe avec le collectif :

Dans certains cas, l'accord peut se faire au singulier ou au pluriel, notamment avec les collectifs la majorité dela minorité deune dizaine de, et d'autres collectifs semblables :

Nous invitons ici le lecteur à relire les deux derniers paragraphes issus du même site : dans le dernier, on montre des collectifs précédés d'un article défini, on l'on prétend que l'accord se fait au choix, alors que dans l'avant dernier, on prétend que l'accord se fait avec le collectif au singulier... n'est pas grammairien ni typographe qui veut...

Le portail nous rappelle aussi que : « Lorsqu'on emploie un collectif qui exprime la quantité, comme : la plupart, beaucoup de, bien des, trop de, quantité de, etc., on accorde le verbe avec le complément au pluriel :

 


 

 

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