<:p>

 
inspiré du site eyesopen

REBEL,
LE MOUTON NOIR


Je m’appelle Rebel et je suis différent
de la masse des moutons blancs.
J’ai le poil noir et raide; je me distingue par ma forte personnalité.
Je ne gobe pas tout ce qu’on me dit.
Je pense par moi-même, pose des questions et trouve des réponses.
Je résiste à la pression du troupeau et m’oppose parfois.
Je refuse de "faire comme les autres,
parce que tout le monde le fait
".

 

BEL,
LE MOUTON BLANC


Je m’appelle Bel et je représente la majorité des moutons.
Blancs, frisés, javellisés, robotisés.
Je suis identique aux autres :
je pense, parle, agis comme les autres.
Je fais partie du troupeau et suis
les autres moutons sans poser de questions.
Je suis convaincu d’avoir raison car "tout le monde le fait".
J’impose ma vérité et exige que les autres y adhèrent.
Je suis suffisant et intolérant.


Moi, Rebel, je suis considéré comme anormal.
Je ne suis pas conforme au normes établies.
Je suis un original non conformiste.
Il suffit que la masse aille dans une direction
pour que j’aille dans l’autre.
On me regarde de travers; on me montre du doigt;
j’ose quand même afficher ma différence.
Je ne fais qu’à ma tête.
 
Si je rentrais dans les rangs des moutons blancs, je mourrais.


Moi, Bel, je suis normal.
Je suis conforme au normes établies. Je fonctionne bien.
Je respecte les standards du bon mouton.
Je suis bien-pensant, je fais partie des honnêtes gens.
Je suis la mode, lis les journaux, regarde la télé, je vais chez le médecin, travaille pour assurer ma sécurité et celle de ma famille.
J’obéis aux lois, paye mes taxes, défends ma patrie.
Et j’impose aux autres d’en faire autant.
Je suis politiquement, religieusement, familialement, spirituellement… moutonnement correct.

Moi, Rebel, je survis.
 
J’ai les yeux ouverts et je vois ce qui se passe.
Je sais comment fonctionnent la société, les systèmes, les gens.
Il y a des gagnants et des perdants.
Je suis astucieux et je sais tirer mon épingle du jeu.

 

Moi, Bel, je suis mort-vivant.
Un véritable zombie.
Métro (ou Mercedes) – boulot – dodo, voilà le résumé de ma vie.
Ma conscience – de qui je suis – est morte.
Comme les fleurs séchées, je suis là,
je suis toujours beau,
mais je suis coupé de mes racines :
je suis mort.
Et je crois être vivant.
Je suis disjoncté de mon âme.
Je suis branché sur le pilote automatique.
 

Je fais semblant de jouer, je me déguise, je remplis mon rôle, mais je ne me fais pas prendre au jeu.
Je suis très bien équipé pour faire face aux situations adverses.


J’ai développé d’excellents outils de protection.
J’ai mes armes à moi et je sais me battre.
La vie est une bataille perpétuelle.
 
Arrêter de se battre, c’est mourir.


Robot synthétique et artificiel, pure création de la société,
je me prends au jeu que je joue,
sans même m’en rendre compte.
Je porte l’habit d’un personnage et finis par devenir le personnage :
je suis père de famille, ouvrier, religieux, médecin, avocat, politicien, syndicaliste, enfant terrible, motard, adolescent, mère de famille, grand-parent, retraité, artiste, intellectuel, homme d’affaires, sportif, sage détaché et indifférent, activiste, professeur, chef de bande, chef de parti, chef spirituel, pape, dalaï-lama, chaman, thérapeute, vedette, bon garçon, artisan, humaniste, missionnaire, etc…

Je joue mon rôle inlassablement,
sans me poser de questions.
Dieu, les altérités ou le temps… arrangeront bien les choses.
Je suis un inconscient tranquille.
 

Moi, Rebel, je suis en réaction.
Je réagis au quart de tour.
Je vois ce qui se passe et je m’oppose, je confronte, je proteste,
je résiste, je lutte, je combats, je dénonce,
je manifeste, j’accuse, je condamne, je fais la grève, je boycotte…

Je fais des vagues et je ne connais pas la tranquillité.
Je navigue du mieux que je peux dans ce monde d’adversité.
Je sauve ma peau et je sauve mon âme : je fais des compromis pour assurer ma survie.
Il m’arrive parfois de m’éclater et de faire voir ma vraie nature.

Tantôt Don Quichotte, tantôt Jeanne d’Arc, tantôt Robin des bois…
je m’attire des ennuis, mais c’est le prix à payer pour se tenir debout.

Ça ne peut continuer ainsi. Il faut que ça change.

 

Moi, Bel, je baigne dans l’inaction.
Pas de vagues, pas de troubles, pas d’ennuis.
Surtout faire comme les autres pour ne pas me faire remarquer.
Je suis mort de peur. J’achète la paix à tout prix.
Je ne cours aucun risque.
J’observe l’ « omerta », la loi du silence.
Je suis une tombe ; je garde le secret :
secret de famille, secret professionnel, société secrète, service secret, document secret, honte secrète…
J’ai horreur du changement.
Tout n’est pas parfait, certes, mais ce pourrait être pire.
Tant que j’ai un toit et que je mange trois repas par jour,
je peux m’estimer chanceux…
surtout si je me compare avec les gens du Tiers-Monde…

Je m’accroche au statu quo, je maintiens la stabilité.
Je n’interviens pas
car je nourris l’espoir que « le temps arrange les choses ».
Je fais partie de la majorité silencieuse.
 

 
Moi, Rebel, je me méfie des altérités extérieures.
Elles ne sont pas bonnes pour moi.
Elles prétendent me protéger et en profitent pour m’enlever mes droits et mes biens.
L’argent mène le monde. Les lois servent les riches.
Il n’y a pas plus menteur qu’un politicien.
On se fait avoir de tous les côtés.
Mêêê on n’a pas le choix.
On a besoin d’altérités pour assurer l’ordre.
C’est un mal nécessaire.
Il faut se regrouper et faire pression pour que les altérités servent mieux les intérêts du peuple.


Il faut faire la lutte à la pauvreté, la maladie, l’injustice sociale, la malhonnêteté, la violence…
Utiliser tous les moyens que l’on connaît :
audience, enquête, manifeste, tribunal, résistance pacifique, grève de la faim, désobéissance civile…
Pour mettre en place de bons bergers qui veilleront au bien-être de leurs moutons.
Et rétablir la vraie démocratie.

N’abandonnons pas la lutte. Organisons-nous.
Ensemble, on y arrivera.
 

Moi, Bel, j’ai foi dans les altérités extérieures.
Je leur fais confiance.
Elles sont bonnes pour moi.
Elles veillent à mon bien et me protègent.
Tout le monde n’est pas égal.
Il y a des êtres supérieurs et je me réjouis d’être gouverné par eux.
Sinon, ce serait le chaos, le désordre… l’anarchie.

 


J’ai très peur que pareille situation ne se produise.
« L’homme est un loup pour l’homme »
et on a absolument besoin de bergers pour nous protéger les uns des autres.
Je trouve normal qu’il y ait une hiérarchie :
avec des bergers et des moutons;
des dominants et des dominés, des riches et des pauvres;
des puissants et des faibles.
"On a toujours besoin d’un plus petit… et d’un plus grand que soi."
Voilà mon credo.

Moi, Rebel, je suis insoumis.
Je n’obéis pas aux altérités.
Altérité est synonyme d’ennemi et je lui fais la guerre.
Me soumettre, ce serait mourir.
J’ai toujours été désobéissant.
J’ai commencé avec mes parents ; puis j’ai continué à l’école ;
et je désobéis encore.
Cela m’attire quelques ennuis,
mais m’apporte aussi beaucoup de satisfaction.
Je triche avec l’impôt, je contourne les lois, je travaille pour moi…
je monte même mon organisation parallèle pour faire concurrence au système établi.
Il suffit de ne pas me faire prendre par le chien-berger-policier.
J’en ai toujours peur.

 

Moi, Bel, je suis soumis.
Je reconnais des altérités extérieures à moi et me place sous leur gouverne.
Je crois aussi au bien-fondé du chien-berger-policier
pour maintenir l’ordre établi par le berger dans le troupeau
et assurer ma sécurité.
Sans cela,
ce serait le désordre et le chaos dans la bergerie.

J’obéis aveuglément aux ordres reçus
et donne aux altérités le fruit de mon labeur.
Je suis un esclave avec une couronne sur la tête :
je m’appelle démocratie!

Moi, Rebel, je reçois des coups de bâton
pour me punir de ma désobéissance
et me forcer à réintégrer les rangs du droit chemin.
Le berger se sent menacé par les insoumis
et leur inflige de sévères punitions
pour décourager les autres moutons d’en faire autant.
Si j’en vaux la peine,
le berger tentera de me récupérer avec des carottes P.A.P. :
promotion syndicale, poste prestigieux, décoration, nomination, etc…
"Every body has a price" (tout le monde a un prix), disait un ami américain.
SI je n’en vaux pas la peine ou si je suis trop rebelle,
les trois bâtons m’attendent.
Ce sont, dans l’ordre : l’exclusion, la dépossession, l’élimination (bâtons E.D.E.).

 
Moi, Bel, je reçois des carottes
pour récompenser mon obéissance
et m’inciter à continuer à servir le berger.
Ce sont des avantages sur les autres moutons.
Bel, je suis promu à un échelon élevé dans la hiérarchie sociale.
J’avance d’un pas dans les rangs des privilégiés.
Je monte en grade dans l’échelle du succès.
J’espère bien, un jour, devenir moi-même berger.
Je caresse l’ambition de l’ « American Dream » :
toute personne peut un jour devenir présidente des États-Unis…
Les altérités s’assurent de mon obéissance et de ma fidélité
en nourrissant mon rêve.
Elles me font courir après trois carottes :
pouvoir, argent, prestige (carottes P.A.P.).


1. Le bâton de l’exclusion

Je suis exclu du troupeau.
Discrédit, ridicule, diffamation, scandale au besoin, rien ne m’est épargné.
Je perds mes amis, mes collègues, ma famille…
Je ne fais plus partie des leurs.
Je ne suis plus invité, plus informé, plus soutenu.
On me regarde comme une brebis galeuse.
Les autres moutons s’éloignent de moi et m’abandonnent à mon sort.
Je suis laissé seul avec moi-même.
Je perds ma réputation.
Je suis exclu des carottes à tout jamais.

La peur de l’exclusion suffit, à elle seule dans 95% des cas,
à ramener « la brebis égarée » dans le droit chemin.

À javelliser le mouton noir.
 

1. La carotte du pouvoir sur les autres

Je peux enfin dominer d’autres moutons.
Je me suis fait conférer de l’altérité sur eux.
Ils me respectent et me craignent.
Je me sens important dans mes fonctions.
Je peux moi aussi me comporter en chef,
donner des ordres et exiger obéissance.
Je ne suis plus un quidam, un simple mouton anonyme.
Je suis enfin quelqu’un.
J’ai du poids.
Je suis influent.

2. Le bâton de la dépossession

Je suis dépossédé de mes droits et de mes biens.
La loi du berger, renforcée par le chien-berger-policier, me frappe, moi, mouton Rebel.
Je suis assailli de toutes parts :
contrôle fiscal, procès, exigence de remboursement, coupure de crédit,
amendes, poursuites, vérifications professionnelles…
Rien n’est épargné pour m’enlever mes biens : maison, épargnes, salaire, possessions, situation…
Les droits d’exercice de ma profession ou de mon métier me sont retirés…
jusqu’à mes droits de parent qui me sont confisqués si je ne me soumets pas au berger.
La menace de perdre ses biens et ses droits est très efficace.
 

2. La carotte de l’argent

Avec ma promotion, je reçois les avantages financiers :
bourse, meilleur salaire, bénéfices marginaux, voiture, logement, déplacements, compte de dépenses…
J’ai accès à l’information privilégiée qui rapport bien…
J’améliore mon train de vie, agrandis ma maison, change de voiture.
J’impressionne les autres moutons.
Je suis un exemple à suivre.

3. Le bâton de l’élimination

Je suis retiré de la circulation ;
mis hors d’état de nuire aux intérêts du berger.
Je subis la prison et/ou la mort.
Au nom de la protection des moutons blancs,
le berger dispose de deux types de prisons :
l’institution carcérale, la prison avec barreaux ;
et l’institution psychiatrique, la prison sans barreaux.
Dans les deux cas,
les moutons noirs y sont « détenus » tant qu’ils ne sont pas bien blanchis.
Et si le berger me trouve vraiment trop dérangeant,
il me fait disparaître pour de bon :
accident d’avion ou de voiture, empoisonnement, maladie,
ou simple assassinat par balle de provenance inconnue…
 

3. La carotte du prestige

Avec ma promotion, j’améliore mon score de prestige, de considération, de réputation :
titre, diplôme, certificat, nomination, consécration, médaille, décoration, position, grade, distinction, honneurs…
Je me distingue de la masse.
Les médias parlent de moi.
Même mes cartes de visite et mon papier à lettres témoignent de mon statut :
PDG (tu dois savoir que cela veut dire président-directeur général), M.D. (…médecin), Ph.D. (…doctorat), directeur, évêque, chef, contrôleur, vérificateur, percepteur, responsable, ministre, Premier ministre, etc…
Les autres moutons m’appellent Docteur, Maître, Votre excellence, Révérend, Monseigneur, Honorable, Votre Altesse, Sa majesté, Lord, Sa Sainteté, Major, Général, Commandant, Votre Honneur, etc…
Ils me respectent, m’admirent et me vénèrent.
Un jour, ce sera peut-être leur tour…
 


Le bâton suprême : l’enfer pour l’éternité

Par-dessus tout, plane la menace de brûler en enfer pour l’éternité
si je désobéis aux commandements de l’Église,
qui marchent main dans la main avec ceux du berger.
Cette crainte m’a habité longtemps et ronge encore plusieurs de mes collègues moutons noirs.
Elle amène tous ceux qui voudraient un jour secouer le joug de l’emprise religieuse sur eux à faire le calcul suivant :
il vaut mieux se soumettre et souffrir pendant la durée d’une vie
plutôt que brûler atrocement dans le feu de l’enfer pour l’éternité.
C’est aussi la peur de ce bâton qui maintient d’autres fidèles dans la pratique religieuse
« au cas où ce serait vrai… »
 

La carotte suprême : le paradis à la fin de mes jours

Et, à la fin de mes jours, je recevrai la carotte suprême, le droit au paradis pour l’éternité.
À condition, bien entendu, que j’aie eu une vie exemplaire d’obéissance et de soumission et que j’accepte de mourir.
Cette carotte est si grosse que je ne peux l’obtenir de mon vivant.
 
C’est une carotte post-mortem.
Mais elle est tellement extraordinaire qu’elle mérite bien le sacrifice de toute une vie sur terre.


inspiré du site eyesopen